
Dans un article de La Croix, François Moog, directeur de l’Institut supérieur de pastorale catéchétique (Institut catholique de Paris), explique que les conférences épiscopales se préoccupent actuellement de la catéchèse. « Il y a urgence à modifier nos pratiques en matière de catéchèse », résume-t-il. Mais dans quel sens ? Même s’il apparaît que l’évangélisation devient une priorité de l’action à accomplir dans ce domaine, il semble qu’il y ait encore beaucoup de chemin à parcourir avant d’arriver à la question de la proclamation du kérygme dans la catéchèse qui est à l’oeuvre aujourd’hui auprès des enfants. Explications.
Le directeur de l’Institut supérieur de pastorale catéchétique est interrogé par La Croix (lire ici) alors que se réunit le 4e colloque international de l’ISPC (l’Institut supérieur de pastorale catéchétique) : « 300 participants venus du monde entier vont réfléchir au regain d’intérêt catholique pour la responsabilité catéchétique. »
Il explique les raisons de cet intérêt, selon lui : « La première raison de cet intérêt tient à l’impulsion donnée par le Magistère depuis l’exhortation apostolique Catechesi tradendæ de Jean-Paul II en 1979 (lire ici), le Catéchisme de l’Église catholique en 1992 et le Directoire général pour la catéchèse de 1997. Ces textes ne sont pas tout récents, mais les évêques ont pris le temps d’ouvrir le dossier, et nous en tirons profit aujourd’hui. Leur ligne de force est la nouvelle évangélisation, dont les communautés nouvelles ont été les premières à s’emparer, mais qui mobilise de plus en plus aujourd’hui les Églises locales. »
Si nous sommes ravis que la nouvelle évangélisation soit ainsi vue comme une façon de pratiquer la catéchèse, nous pouvons tout de même regretter que le constat n’aille pas plus loin : quid de la distinction entre première annonce de l’Evangile (qui a suscité la conversion) et l’approfondissement de la foi ?
L’exhortation apostolique citée plus haut, Catechesi tradendæ, rappelle que les enfants ne sont plus égaux en arrivant au cathéchisme : les uns ont reçu la foi de leurs parents, les autres non. Il faut donc semer le kérygme pour ces derniers. Le paragraphe 19 de cette exhortation, intitulé »Catéchèse et première annonce de l’Evangile » précise très bien les modalités de cette transmission : « Dans la pratique catéchétique, cet ordre exemplaire doit tenir compte du fait que souvent la première évangélisation n’a pas eu lieu. Un certain nombre d’enfants baptisés dès la première enfance viennent à la catéchèse paroissiale sans avoir reçu aucune autre initiation à la foi, et sans avoir encore aucun attachement explicite et personnel à Jésus-Christ, mais seulement la capacité de croire mise en eux par le baptême et la présence de l’Esprit Saint; et les préjugés d’un milieu familial peu chrétien ou de l’esprit positiviste de l’éducation créent vite un certain nombre de réticences. Il faut y ajouter d’autres enfants, non baptisés, pour lesquels les parents n’acceptent que tardivement l’éducation religieuse: pour des raisons pratiques, leur étape catéchuménale se fera souvent en grande partie au cours de la catéchèse ordinaire. Ensuite, beaucoup de préadolescents et d’adolescents, qui ont été baptisés et qui ont reçu une catéchèse systématique ainsi que les sacrements, demeurent encore longtemps hésitants pour engager toute leur vie avec Jésus-Christ, quand ils ne cherchent pas à esquiver une formation religieuse au nom de leur liberté. Enfin les adultes eux-mêmes ne sont pas à l’abri des tentations de doute ou d’abandon de la foi, par suite notamment du milieu incroyant. C’est dire que la «catéchèse» doit souvent se soucier, non seulement de nourrir et d’enseigner la foi, mais de la susciter sans cesse avec l’aide de la grâce, d’ouvrir le cœur, de convertir, de préparer une adhésion globale à Jésus-Christ chez ceux qui sont encore sur le seuil de la foi. Ce souci commande en partie le ton, le langage et la méthode de la catéchèse. »
Aussi, à quoi bon se demander si ce texte est encore valide aujourd’hui ou constater que nous avons du mal à le mettre en pratique ? Qu’il est difficile d’admettre le nouveau contexte de sécularisation ? Pourquoi opposer deux conceptions de l’évangélisation, entre « ceux qui mettent en avant l’homme, la vie humaine au sein de laquelle il faut concevoir l’annonce » et « ceux qui voient la foi comme un contenu, une doctrine qui changera ensuite les comportements » ? Evangéliser ne signifie-t-il pas transmettre la Bonne Nouvelle du salut, la rencontre personnelle avec le Christ, mais aussi, et donc, annoncer le kérygme ?
« Il est normal que la définition de nouvelles orientations prenne du temps, conclut ce responsable. Mais nous voulons dire aussi qu’il y a urgence à modifier nos pratiques : ce qui est en jeu, c’est la crédibilité de l’Évangile et de l’Église dans le monde d’aujourd’hui. » Non, ce qui est en jeu n’est pas la crédibilité de l’Evangile – car il l’est ! – ni celle de l’Eglise, qui est sainte, mais la cohérence de nos vies de croyants et le salut des âmes.
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